2021 4 photos RENAUD

Présentation

Le Hip-hop de la peinture
Les musiciens du hip-hop se nourrissent de la musique des autres pour écrire la musique de leur époque… « What ? Why did you ask that ? What do you know about my image duplicator?” … Ils triturent, ils dépècent le matériau musical pour lui redonner vie et inventer une nouvelle et subtile combinatoire qui donne une place centrale au collage et à la citation. « What ? Why did you ask that ? What do you know about my image duplicator?” Des peintres ont, en leur temps, procédé de même, par et pour la peinture. Le grand Roy Lichtenstein a voulu laisser une image du monde qui soit bien à lui et, pour ça, il n’avait que la peinture. Alors il s’est arrangé pour que cette peinture, on la reconnaisse au premier coup d’œil ; il a mis cette trame d’imprimerie partout sur ses tableaux et ainsi, a pu faire siennes des images empruntées aussi bien à Disney qu’à Cézanne ou à ces illustres illustrateurs de Comics dont personne n’a retenu le nom… « What ? Why did you ask that ? What do you know about my image duplicator?” A première vue, ma peinture n’a pas grand chose a à voir avec celle de cette grande figure du Pop Art. Sauf qu’elle fonctionne de la même manière et qu’elle n’est rien d’autre, elle aussi, qu’une sorte de machine mentale et picturale qui s’alimente de toutes les images pour aboutir à des tableaux que je signe de mon nom. « What ? Why did you ask that ? What do you know about my image duplicator?” Alors, s’il faut se donner des directions comme le prétend Joseph Beuys, je vais dire que je suis un artiste hip-hop. Parce que je suis de mon époque et parce que nous sommes tous des artistes hip-hop depuis que l’art existe. Je suis un artiste hip-hop parce que je ne veux me priver d’aucune technique, ni d’aucune influence, d’aucune nourriture ; je veux vivre toutes les vies de la peinture, avec brutalité, excès, vitesse, emphase … Je veux peindre pour peindre, peindre pour exprimer le jus de vie que j’ai en moi. Ma nourriture, je la trouve tout autour de moi, partout dans cette époque du tout-image. Je veux peindre pour être plus vif que mort et parce qu’avant que tout finisse avec de la peinture et un pinceau, il y a la vie, des rencontres, des engagements personnels, des amours, des envies de dire et de s’approprier les choses. Il y a l’Afrique qui est devenue mon Afrique et il y a eu Joseph Beuys qui est devenu mon Saint Joseph. Il y a le sol de mon atelier et il y a le ciel plein d’étoiles. Peindre, c’est pour moi essayer de m’approprier les choses avant de vous les rendre, dans ma version. Il n’y a pas toujours beaucoup d’ordre dans tout ça mais c’est que ma peinture trace les figures des choses plus qu’elle ne les dit avec des mots … « What ? Why did you ask that ? What do you know about my image duplicator?”

Texte de Jean-Luc Renaud

 

Parcours

Artiste français, né en 1957.
Jean-Luc Renaud s’oriente d’abord vers l’enseignement (Ecole Normale d’Instituteurs, puis Université de Rennes II), tout en se passionnant pour l’art.

De 1990 à 1998, il travaille successivement sur plusieurs séries de peintures : Les Didascalies – Les Impressions d’Afrique – Les Cibles (collages/peintures) – Les Croix Bleues
L’artiste s’initie ensuite à la sculpture et continue ses recherches en peinture. Il produit en 1997 ses premières Femmes à Tête de Clou (sculptures assemblages) puis les Marabouts.
En 2000, il crée « la Tribu », grandes sculptures destinées à être exposées sur un site en pleine nature et revient à la peinture avec les « Palimpsestes », peintures sur affiches marouflées sur toile.
2001, séries intitulées « La piste aux étoiles » et « L’atelier des étoiles ».
2002, série intitulée « Saint Joseph Beuys » en hommage à l’artiste.

En 2004, Jean-Luc Renaud démarre la série « Une vie moderne« , série qui lui permettra de s’inscrire dans le mouvement de la figuration narrative et qui lui vaudra une reconnaissance institutionnelle avec une exposition d’une centaine d’œuvres à La Villa Tamaris. En savoir plus.

Depuis, l’artiste développe de courtes séries comme « Manière noire » en 2019 (affiche ci-dessous), ou une série aux teintes sepia en 2021

Expositions récentes

Galeries JAMAULT (La Flotte, Paris, Versailles)
San Sebastian, Espagne
Ambassade de France à Sydney, Australie
Colmar, Saint Paul de Vence, Poitiers,

Exposition institutionnelle :

2011 – VILLA TAMARIS “Centre d’art” La Seyne sur mer

 

Ouvrage édité à l’occasion de l’exposition personnelle de Jean-Luc Renaud à la Villa Tamaris

Affiche de l’exposition 2019 – Galerie Jamault

Une Vie Moderne

“UN ROMAN EN PEINTURE”

 

Au début, j’avais intitulé cette série Petite Hagiographie d’un Saint Moderne puis La Vie illustrée de Robert D. Mais finalement, il a fallu que ce soit “Une Vie Moderne”.

Elle ne pouvait pas s’appeler autrement que La Vie Moderne, comme le roman de Vincent Ravalec. …moderne, parce qu’il y a dans ce mot un parfum de passé et que l’histoire que j’ai dans la tête n’est plus tout à fait contemporaine depuis que Robert est mort. Mais je vous raconte. En septembre 2003, je trouve tout à fait par hasard des photos, très nombreuses, et des textes tapés à la machine. Le tout sous forme de négatifs méticuleusement rangés dans des petites pochettes de papier transparent et de classeurs, 3 petits classeurs, qui associent textes et photographies. Il y a aussi de nombreuses cartes postales, des documents techniques, des notices, des cartes professionnelles…

Robert D. était très organisé et aussi photographe amateur à ses heures. Il y a beaucoup de choses à lire, beaucoup d’informations de natures très différentes sur le personnage, sa maison, sa famille, ses enfants, ses missions à l’étranger, ses vacances. C’est une mine pour qui a envie de s’y plonger, mais il faut d’abord remettre un peu d’ordre dans tout ça et écrire une première trame de la vie de Robert D.
D’emblée, mon projet est conçu : je vais écrire un roman en images, je vais raconter cette vie ou plutôt la peindre. Ce sera de la littérature en images ou de la peinture à raconter ;
En quelques lignes, cette histoire là voici. Robert D. est né à Niort en 1902. Je ne sais rien de son enfance. A 30 ans, il est fonctionnaire de police à Paris. Il est marié, il a deux enfants. Un grand blanc jusqu’à la fin de la guerre … En 1946, il part en mission à New York avec la délégation française à l’ONU. Il enchaîne ensuite des missions à Bruxelles, Berlin, Moscou, dans les Balkans, en Crête, en Tunisie … Il voyage en bateau, à bord d’un transantlantique et d’un croiseur, plus rarement en avion. Il achète une 4cv Renault, il passe ses vacances en Espagne et au Portugal. Il prend beaucoup de photos qu’il développe lui-même. Il consigne aussi tout ce qui lui arrive par écrit dans ces années-là ; 3 classeurs de notes et de photos pour une vie. Il prend sa retraite avec le grade de commissaire divisionnaire. Lui et Madeleine se retirent dans la maison qu’il ont acheté à Niort. Robert a un chien, un épagneul breton. Il vit paisiblement, cherche un sens à sa vie, a une liaison avec Puko qui est japonaise. Il l’a rencontrée à Paris, au congrès des retraités de la police, elle était hôtesse d’accueil. Toujours les vacances en Espagne, toujours la photographie et puis la mort quand on l’attend le moins.

Voilà pour cette vie dont on ne peut percevoir ainsi toute la richesse. Voilà pour la trame de cette histoire qui reste a raconter. A l’heure où je vous écris, j’ai peint 11 chapitres. Chacun d’entre eux est une architecture composite faite de photos empruntées à la collection de Robert, de textes tapés par lui et de documents que j’ai apportés afin de mieux dire cette époque. Sur cette trame, je vais, je veux broder, écrire, raconter la vie de Robert D. ; ce sera bientôt sans doute une vie plus imaginée que réellement vécue, mais n’ai-je pas toute liberté ? Je ne sais pas combien ce roman aura de chapitres, je ne sais pas non plus dans quel ordre les peindre. Ils se suivent, c’est tout. Dans le désordre apparent de la mémoire que je garde de cette histoire, un tableau vient après l’autre. Je voulais vous expliquer un peu, voilà c’est fait. Bonne lecture.

Jean-Luc Renaud, le 10 avril 2004 à 22 heures 20