Présentation

Rencontre

Antoine Gamard est né à Paris en 1977.

Entretien :

Barbara et Nicolas Jamault (GJ) : Bonjour Antoine Gamard ! Nous avons décidé d’accueillir ton travail au sein de notre galerie, gros coup de cœur pour ton univers onirique, tes couleurs et ce que véhicule tes œuvres.

Peux-tu nous parler de ton parcours ?

Antoine Gamard : J’ai d’abord suivi un cursus de mathématiques à Jussieu, puis une formation classique à l’école nationale supérieure des Beaux Arts de Paris, sous la houlette du peintre Claude Viallat. J’ai développé une réflexion basée sur la superposition des écritures et l’imbrication des motifs. Et c’est en juxtaposant ces deux idées et l’utilisation du blanc comme vecteur de pure invention que seule l’imagination voit, que j’ai construit mon travail.

Je suis heureux de présenter à la galerie Jamault mes dernières percées picturales. Les animaux reviennent comme un leitmotiv dans mes toiles, souvent ils s’inscrivent dans la composition, tel un collage surréaliste, au sein d’un décor urbain tissé de graffitis. Il me semble que ma peinture évolue sans cesse, et je crois qu’au fil du temps, mes récits ont gagné en complexité. Mes choix esthétiques sont en perpétuel mouvement, il m’arrive de densifier la composition, et, suivant mon intention picturale, je peux basculer dans la recherche d’espace, il n’y a pas de mode de création totalement défini, bien que ma patte soit toujours présente.

J’entretiens des intentions graphiques, qui donnent force et énergie aux compositions, mais l’aspect graphique n’est qu’une des composantes de mes créations, car je contrebalance par la matière, la couleur, et tout particulièrement, je souhaite toujours présent un sens à mon œuvre, qui se doit de dépasser une certaine immédiateté. En ce moment, je recherche une forme de pur plaisir dans ma peinture, et je crois que l’on peut retrouver des accents pop, des couleurs qui viennent se confronter les unes aux autres, une présence du motif qui réveille. J’ai beaucoup aimé peindre une série comme « Arizona Dream », où au premier plan sont peints dans des dégradés de verts gourmands des cactus artificiels, ponctués par des motifs roses en forme de pansement posés sur des épines, des léopards espiègles jouant avec le spectateur, j’ai gardé une incursion acidulée énergique avec un fond hérité de l’écriture et de l’art urbain.

Je garde quelques mystères dans les intentions pour laisser libre court à celui qui regarde afin d’appréhender de manière polysémique la lecture de l’image.

GJ : Tu nous offres une peinture décomplexée, que l’on pourrait qualifier de gourmande, il semblerait que tu t’éloignes du street art ou de l’art urbain ?

Antoine Gamard : Je vis dans l’instant et à l’instinct, bien entendu, comme tout artiste, je suis en proie aux doutes, et j’ai besoin de sentir la limite, de tutoyer le danger. J’aimais l’esprit street art, je l’aime toujours, il m’a donné plusieurs fondamentaux. La transgression des interdits, les relations avec des artistes géniaux, si je peux faire un parallèle avec la musique, je dirai qu’il y avait dans les années 80/90, une explosion de créativité dans les rues, comme à la fin des années 60 avec le rock (hendricks, the stooges, David Bowie etc etc).

Je me suis éloigné d’un processus de création sériel sans fin où finalement chaque toile finie par ressembler à la précédente… Ce n’est pas mon état d’esprit aujourd’hui, je recherche de nouveaux accords, dans un cheminement de remise en question, sans doute plus difficile, mais qui je crois me permet de découvrir des territoires inexplorés.

Bien entendu, il y a dans mon travail actuel des incursions franches qui correspondent à mes périodes passées. Tous les efforts fournis dans l’élaboration des premières travaux, me permettent d’oublier la technique pour travailler sur la tension émotionnelle, jusqu’à des résultats jubilatoires, c’est ce que j’ai envie de faire partager à travers la galerie Jamault, à ceux qui aiment la peinture.

GJ : Il semblerait qu’entre la peinture et toi, il existe une relation fusionnelle ?

Antoine Gamard : Je marche à l’impulsion, et je me plonge sans restriction, sans rien concéder au réel dans ma peinture, dans une confrontation viscérale avec les fluides colorés. Cette confrontation, je la cherche, dans les mélanges de couleurs, lorsque les frontières sont dépassées et laissent le champ à la part d’aléatoire ! Une démarche pour en extraire du beau, du beau selon moi, mais qui est aussi accueilli par ceux qui « prennent » les œuvres en regardant chaque portion d’une toile. J’espère faire voyager dans la pensée, dans l’émotion et susciter la surprise du spectateur.

GJ : Tu nous parles de beau, c’est une notion subjective…?

Antoine Gamard : La plus belle œuvre du monde ne peut donner que ce qu’elle a. C’est dans notre nature d’agencer le monde dans lequel nous évoluons, jusqu’à, vous en conviendrez, des extrémités fâcheuses, être aussi fort pour créer que pour détruire. On peut s’accorder sur la beauté ou non d’un paysage, mais là, c’est le lien qui nous unit à la nature qui est en jeu. Ce lien je le veux sincère, et faire en sorte de créer dans une impulsion positive, pour offrir le fruit de cette relation à ceux qui le souhaitent. Chercher le beau et le partager, donner du sens, c’est mon choix. S’il y a des incursions de kitch, de naïveté, d’abstraction, c’est tant mieux ! Parce que tout un chacun est parfois kitch, naïf, abstrait, et surtout en amour comme en peinture sous ses formes les plus variées.

Entretien – Juin 2023, Paris

EXPOSITIONS

2023 : Galerie Jamault, Paris (23/09 – 18/10)